Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1 - (Page 266)

248 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS 739. Dans l’ensemble, les actes administratifs réglementaires peuvent être plus facilement remis en cause que les actes individuels dans la mesure où ils font partie de la légalité dite objective. Cela se traduit par le principe selon lequel aucun administré n’est titulaire du droit au maintien d’un règlement administratif. 2. Une distinction presque inutile en droit administratif général 740. La distinction des actes réglementaires et des actes non réglementaires ne permet pas de rendre compte de la jurisprudence relative à la mutabilité des actes administratifs qui lui préfère la distinction d’actes créateurs de droits ou non (a). En revanche, certaines règles de forme ou de procédure reposent sur le caractère réglementaire ou non de l’acte : l’édiction des actes individuels est entourée de garanties plus nombreuses pour les droits des administrés (b). a) L’inutilité de la distinction au regard du caractère créateur de droits ou non de l’acte administratif 741. En droit administratif, la distinction des actes réglementaires et des actes individuels est souvent mise en parallèle avec celle des actes créateurs de droits et des actes non créateurs de droits, utilisée par le juge administratif pour déterminer les pouvoirs de retrait et d’abrogation des actes administratifs par l’administration, ou encore le maintien en vigueur de certains actes suite à l’annulation de l’acte qui leur sert de fondement. Il est largement admis que les actes réglementaires ne sont pas créateurs de droits et que seuls des actes individuels sont susceptibles d’en créer. Pour autant, il existe des actes individuels non créateurs de droits, comme les autorisations de police ou les emplois à la décision du gouvernement. Les deux distinctions ne se recouvrent pas. 742. Surtout, il importe de bien préciser ce que l’on entend par le mot « droit ». En effet, l’idée a autrefois été défendue qu’une règle générale ne pouvait pas créer de droits subjectifs au profit des administrés. À défaut d’un acte individuel, unilatéral ou contractuel, un individu était considéré par la doctrine, comme ne disposant d’aucun titre pour pouvoir exiger quelque chose, une action ou une abstention de la part des autorités publiques204. Ainsi Duguit a-t-il pu écrire dans la première édition de son Manuel de droit constitutionnel parue en 1907 qu’« il y a dans la loi une disposition par voie générale par laquelle l’État n’entre point en relation avec les individus »205 et dans l’édition de 1911 de son Traité de droit constitutionnel qu’une règle générale « prise en elle-même ne fait naître ni droit ni obligation à la charge de qui que ce soit »206. De même, Marcel Leb., p. 60, concl. J. Kahn. Si l’acte est non réglementaire, il faut distinguer selon qu’il est ou non considéré par la jurisprudence comme « créateur de droits ». L’abrogation d’un acte non réglementaire non créateur de droits n’est soumise à aucune condition de légalité ni de délai (CE, Ass., 10 mai 1968, Commune de Brovès, Leb., p. 297 ; CE, Ass., 22 déc. 1989, Morin, Leb., p. 279 (nomination à un emploi à la discrétion du gouvernement)). En outre, le Conseil d’État a étendu la jurisprudence Ternon à l’abrogation : l’administration peut abroger une décision expresse individuelle créatrice de droits illégale dans le délai de quatre mois suivant l’intervention de cette décision (CE, Sect., 6 mars 2009, Coulibaly, req. n° 306084, publié au Lebon ; AJDA 2009, p. 815-82, chron. S.-J. Liéber et D. Botteghi ; RFDA 2009, p. 215-225, concl. C. de Salins). 204. N. FOULQUIER, Les droits publics subjectifs des administrés - Émergence d’un concept en droit administratif français du XIXe au XXe siècle, préf. de F. Moderne, Paris, Dalloz, coll. « Nouvelle bibliothèque de thèse », spéc. p. 205 et s. 205. L. DUGUIT, Manuel de droit constitutionnel, Paris, A. Fontemoing, 1907, p. 667, cité par N. Foulquier, thèse, op. cit., p. 208. 206. L. DUGUIT, Traité de droit constitutionnel, t. 1, Paris, Boccard, 1911, p. 3.

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