Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1 - (Page 211)

LA RÈGLE GÉNÉRALE, REMPART CONTRE L’ARBITRAIRE DES GOUVERNANTS 193 570. En ce qui concerne, non plus la compétence, mais la forme et la procédure de l’opération d’édiction des actes porteurs de normes particulières, le rapport hiérarchique entre règles générales et règles particulières ne présente là non plus aucune spécificité. S’agissant des normes administratives, les actes tant réglementaires qu’individuels et/ou concrets sont soumis à des règles de forme et de procédure diverses. 571. La spécificité de la relation hiérarchique entre les normes générales et les normes particulières résiderait dans le fait que le rapport hiérarchique entre les règles générales et les règles particulières serait plus exigeant, plus poussé que celui qui existe entre d’autres types de normes. Pour employer le vocabulaire de Charles Eisenmann, il ne s’agirait pas seulement d’une obligation de compatibilité, c’est-à-dire de non contrariété, mais de conformité217. L’auteur explique en effet que le principe de compatibilité permet à l’administration de faire tout ce qui ne lui est pas interdit par la loi, tandis que le principe de conformité la contraint de ne faire que ce qui est permis par la loi218. Il explique ensuite que s’il existe une obligation de conformité en ce qui concerne la forme, i.e. la légalité externe, pour tous les actes juridiques administratifs, en revanche, du point de vue interne, le principe de légalité ne correspond qu’à l’exigence minimum de compatibilité, sauf « pour les normes d’espèce – individuelles ou particulières – des actes unilatéraux »219. 572. Le vocabulaire adopté par Charles Eisenmann peut prêter à confusion car, comme le souligne Paul Amselek, soit une norme est conforme à une autre, soit elle ne l’est pas : « Il n’y a pas de demi-mesure »220. Par exemple, si, comme en droit de l’urbanisme, la loi n’exige qu’un simple rapport de compatibilité entre certaines normes, notamment entre les plans locaux d’urbanisme et les schémas de cohérence territoriale (art. L. 123-1 du Code de l’urbanisme), exigence interprétée par le juge comme autorisant des différences mineures entre les deux normes221, la norme qui est compatible avec l’autre norme lui est par là même conforme : l’administration, en l’édictant, agit conformément à ce qui a été autorisé par la loi. 573. Quoi qu’il en soit, se pose la question de savoir si le contenu des normes administratives particulières doit nécessairement être prédéterminé par une règle générale supérieure. 2. L’absence d’obligation d’une règle générale écrite prédéterminant le contenu de tout acte administratif individuel 574. Les arguments apportés au soutien de l’existence de l’obligation d’un règlement prédéterminant le contenu de tout acte individuel, a priori nombreux, se révèlent finalement non probants. 575. Il faut tout d’abord distinguer les cas où c’est la loi qui est interprétée par le juge administratif comme exigeant un règlement préalable à toute décision 217. C. EISENMANN, « Le droit administratif et le principe de légalité », op. cit., ici p. 30. 218. Ibid., p. 31. 219. Ibid., p. 37. 220. V. en ce sens : P. AMSELEK, Perspectives critiques d’une réflexion épistémologique sur la théorie du droit - Essai de phénoménologie juridique sur la théorie du droit, préf. de C. Eisenmann, Paris, LGDJ, coll. « Bibliothèque de philosophie du droit », vol. II, 1964, p. 122. 221. CE, Ass., 22 févr. 1974, Adam, Leb., p. 145.

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