Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1 - (Page 179)

LA RÈGLE GÉNÉRALE, REMPART CONTRE L’ARBITRAIRE DES GOUVERNANTS 161 460. De même, l’article 23 de la loi du 22 juillet 1983 a prévu une répartition des dépenses de fonctionnement entre commune de résidence et commune d’accueil tout en la subordonnant à l’insuffisance de la capacité d’accueil des établissements scolaires de la commune de résidence100. Cette faculté d’inscription dans une école dépend de la réglementation applicable. Dans l’arrêt Di Lello du 7 décembre 1990, le Conseil d’État rappelle qu’il n’appartient pas au conseil municipal d’édicter des règles générales relatives à l’admission dans les écoles maternelles. Il ne dispose pas légalement en cette matière d’un pouvoir réglementaire101. 461. S’est également posée la question de savoir si l’administration pouvait unilatéralement résilier des contrats administratifs non seulement en procédant par décision individuelle mais aussi par la voie réglementaire. Le Conseil d’État admet cette seconde possibilité à partir de l’arrêt Distillerie de Magnac-Laval du 2 mai 1958102. Dans sa note sous l’arrêt, André de Laubadère approuve la solution du Conseil d’État103. En réalité, le juge admet simplement que la décision de résiliation soit prise pour un ensemble de contrats, dans un décret contenant par ailleurs des dispositions de portée générale. Néanmoins, la mesure de résiliation n’a pas elle-même un caractère réglementaire mais collectif, dans la mesure où elle vise un ensemble déterminé – et non une catégorie ouverte – de contrats. des dispositions d’ordre réglementaire ; que, par suite, l’arrêté en date du 14 mars 1952 par lequel le Préfet de Meurthe-et-Moselle a prévu le mode de calcul de la « distance minimum entre deux officines, susceptibles d’être « imposée par une licence d’exploitation », qui fixe une distance déterminée pour la généralité des cas, est entaché d’excès de pouvoir ». 100. Loi n° 83-663 du 22 juill. 1983 complétant la loi du 7 janv. 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État, JO du 23 juill. 1983, p. 2286. 101. CE, 7 déc. 1990, Di Lello, AJDA 1991, p. 151. 102. CE, Ass., 2 mai 1958, Distillerie de Magnac-Laval, Leb., p. 246 ; AJDA 1958, II, p. 282, concl. J. Kahn ; D. 1958, p. 730, note A. de Laubadère. V. G. DUPUIS, Les privilèges de l’administration, Thèse, Paris, 1962, p. 127-128 : « Les tribunaux ont longtemps considéré que l’Administration devait, dans cette hypothèse, procéder par décision individuelle ; il fallut attendre l’arrêt Distillerie de Magnac-Laval pour que le Conseil d’État admit une résiliation par une norme générale – contre l’avis de son commissaire du Gouvernement hostile à cette extension des prérogatives administratives ». 103. A. DE LAUBADÈRE, note sous CE, Ass., 2 mai 1958, Distillerie de Magnac-Laval, D. 1958, p. 730 et s., ici p. 734 : « Du point de vue de la correction juridique, on voit mal pourquoi l’autorité administrative ne pourrait réaliser sous la forme d’une mesure collective unique ce qu’elle pourrait faire par une série de décisions concomitantes mais distinctes. (…) En réalité, il est facile d’apercevoir que cette question de forme ne se pose pas vraiment, tout simplement parce que le décret est l’instrument juridique absolument général et unique que notre droit public met entre les mains du Gouvernement indifféremment pour édicter des règles générales abstraites et permanentes ou prendre des mesures concrètes à caractère collectif ou individuel. Si l’on admet que le Gouvernement n’est pas incompétent pour prononcer la résiliation de contrats de l’État, il est évident qu’il ne peut le faire qu’en employant la forme juridique du décret, et rien ne lui interdit d’introduire dans un décret réglementaire, contenant par ailleurs des réglementations permanentes, des dispositions prononçant la résiliation d’un ensemble de contrats, pas plus du reste qu’il ne serait interdit d’y introduire une disposition purement individuelle prononçant la résiliation d’un contrat déterminé. En définitive, on voit que cette question de la validité de l’emploi du pouvoir réglementaire pour la résiliation de contrats administratifs n’est pas une question de forme juridique, mais uniquement de compétence ; il n’y a pas de question de la validité de la « résiliation réglementaire », mais seulement de la « résiliation gouvernementale » (…) Mais il n’en demeure pas moins très important de préciser que, s’il n’est pas interdit en principe à l’autorité administrative d’employer pour résilier des contrats administratifs la forme du décret réglementaire (parce que le décret réglementaire n’est en lui-même qu’une forme), elle agit alors, non au titre de son pouvoir d’édicter des règles de droit abstraites (c’est-à-dire de son pouvoir réglementaire proprement dit), mais au titre de ses pouvoirs d’administration contractante, pouvoirs issus de la théorie générale des contrats administratifs ». L’État n’aurait pu résilier des contrats passés par d’autres personnes publiques. La résiliation administrative unilatérale, bien que prise en la forme réglementaire, est un fait du Prince.

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