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154 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS 443. En revanche, la loi de règlement, qui permet au Parlement d’examiner chaque année les résultats effectifs de l’exécution des lois de finances qu’il a votées, semble dépourvue de portée générale. En effet, comme elle a pour objet d’arrêter le montant définitif des recettes et des dépenses du budget de l’année ainsi que le résultat budgétaire69, elle intervient a posteriori et vise donc des recettes et des dépenses déterminées. 2. La validité des lois particulières en droit public français 444. Le Conseil constitutionnel admet tout à fait que le législateur adopte des lois non générales (a). Le droit public français se montre particulièrement indifférent à la portée des lois puisqu’il les soumet au même régime, à la différence du droit anglo-saxon qui prévoit une procédure spéciale pour les private bills (b). a) L’admission des lois particulières par le Conseil constitutionnel 445. Il faut faire la différence, au sein de la doctrine, entre les auteurs essentialistes, tels Duguit et ses disciples, et ceux qui au contraire s’appuient sur le droit positif. L’idée selon laquelle la loi est nécessairement générale est encore aujourd’hui partagée par de nombreux auteurs70. Ceci étant, dans la mesure où l’on prétend décrire scientifiquement le droit, la loi ne peut être définie comme une règle générale que si le droit positif la définit comme telle. Or, le droit français ne consacre pas cette conception matérielle de la loi. La position qu’avaient adoptée Duguit, Artur ou Esmein consistant à refuser de considérer comme de véritables lois les actes législatifs non généraux va être abandonnée71. Il revient à Raymond Carré de Malberg d’avoir vigoureusement dénoncé cette attitude essentialiste dans sa Contribution à la théorie générale de l’État spécialement d’après 69. Art. 37 de la loi organique relative aux lois de finances. 70. Les civilistes se réclament encore des propos de J.-M.-É. PORTALIS, dans son Discours préliminaire au projet de Code civil : le législateur a pour mission « de fixer, par des grandes vues, les maximes générales du droit, d’établir des principes féconds en conséquence et non de descendre dans le détail des questions qui peuvent naître sur chaque matière (…) la loi statue sur tous ; elle considère les hommes en masse comme particuliers ; elle ne doit point se mêler des faits individuels, ni des litiges qui divisent les citoyens (…) la loi est une déclaration solennelle de la volonté du souverain sur un objet d’intérêt commun ». V. ainsi : G. RIPERT, Les forces créatrices du droit, Paris, LGDJ, 2e éd., 1955, p. 312 : « Le principe essentiel de la technique législative fondamentale est la généralité de la loi ». Dans la plupart des ouvrages d’introduction au droit demeure l’idée que la loi est générale. V. par ex. : J.-L. AUBERT, Introduction au droit et thèmes fondamentaux du droit civil, Paris, Sirey, coll. « Université », 11e éd., 2006, p. 61 ; P. MALINVAUD, Introduction à l’étude du droit, Paris, Litec, coll. « Manuel », 2006, p. 72 ; R. CABRILLAC, Introduction générale au droit, Paris, Dalloz, coll. « Cours », 6e éd., 2005, p. 92 : l’auteur retient le sens matériel de la loi. 71. Déjà, Joseph Barthélemy a une position assez nuancée par rapport à celle de Léon Duguit. Dans une note parue à la Revue du Droit Public, en 1907, « à propos du châtiment infligé aux mutins du 17e régiment d’infanterie par la loi du 9 juillet 1907 », il affirme : « Disons tout d’abord que, pour notre part, nous ne saurions reprocher à un acte du Parlement le défaut d’indétermination et de généralité : sans doute (…) ces caractères sont essentiels à la loi proprement dite, entendue au sens strictement juridique. Mais il est évident que le Parlement fait des actes qui ne sont pas des lois ; et qu’il en a le droit. ». J. BARTHÉLÉMY, « De la dérogation aux lois par le pouvoir législatif - et plus spécialement du pouvoir pour le Parlement de faire des lois pénales spéciales, applicables rétroactivement à certaines infractions déterminées. À propos du châtiment infligé aux mutins du 17e régiment d’infanterie par la loi du 9 juillet 1907 », Notes parlementaires, RDP 1907, p. 472. V. aussi : G. CAHEN, La loi et le règlement, thèse, Paris, Rousseau, 1903. L’auteur estime que la généralité est un caractère, certes, habituel, mais non nécessaire de la loi car il faut reconnaître que « la loi peut atteindre des cas déterminés sous une apparence d’abstraction » et admettre « que cette précision ne peut pas constituer une qualité essentielle, et qu’il est des circonstances où elle peut, où elle doit même disparaître ».

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