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152 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS 439. En outre, si les dispositions financières des lois de finances ne consacrent qu’une faculté pour les pouvoirs publics d’engager les dépenses, les dispositions fiscales établissent bien une obligation de percevoir les impôts57. 440. Il a également été soutenu que « la loi de budget n’est pas une loi comme les autres et [que] les autorisations de dépenses qu’elle comporte, pour être des dispositions légales, ne sont pas des dispositions législatives proprement dites ; elles n’énoncent pas de règles auxquelles le pouvoir exécutif serait tenu de se conformer »58. En effet, les autorisations de dépenses auraient, en raison de leur caractère d’actes particuliers, une valeur inférieure aux lois véritables et seraient soumises à ces dernières. Ainsi le Conseil d’État a-t-il jugé que la diminution par la loi des crédits afférents à la rémunération d’un emploi n’équivaut pas à la suppression dudit emploi59 et inversement, que l’ouverture par une loi de finances de crédits pour un emploi supprimé ne vaut pas rétablissement de cet emploi60. Cependant, comme l’explique le professeur Paul Amselek, ces solutions jurisprudentielles ne s’expliquent pas par l’idée que les lois de finances ne sont pas de véritables lois, mais simplement par le fait qu’elles ont « une portée bien délimitée », « purement financière », « consistant à fixer la marge du pouvoir de dépenser de l’exécutif61. En d’autres termes, « le juge ne dit pas qu’elles n’ont pas valeur de dispositions de loi, mais plus exactement qu’elles n’ont pas, par exemple dans le cas d’une réduction de crédits de personnel, “valeur d’une disposition de loi portant suppression d’emploi” »62. 441. Les commentateurs des grandes décisions du Conseil constitutionnel considèrent quant à eux que la loi relative à l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie, qui « a pour objet, en application de l’article 119 de la loi du 6 septembre 1984, de conférer au Haut-Commissaire de ce territoire, jusqu’au 30 juin 1985, les pouvoirs prévus par la loi du 3 avril 1955 », tout comme les lois prorogeant l’état de siège ou autorisant la déclaration de guerre, sont des « “décisions non normatives” du Parlement, ou du moins ne contenant pas de dispositions normatives à caractère général »63. Cette qualification est également contestable. La loi relative à la Nouvelle-Calédonie susmentionnée est une règle générale : elle vise une personne juridique – le Haut-Commissaire – et non un individu déterminé. Le fait que son champ d’application soit limité dans le temps et l’espace ne lui ôte pas son caractère général, dès lors qu’elle reste applicable à un nombre indéterminé de situations64. Il en est de même de la loi prorogeant l’état de siège. En revanche, celle autorisant la déclaration de guerre apparaît bien comme une loi de portée particulière dans la mesure où elle vise un objet unique, une guerre déterminée. 57. V. par ex., M. BOUVIER, M.-C. ESCLASSAN, P. LASSALE, Finances publiques, Paris, LGDJ, coll. « Manuel », 7e éd., pp. 340-341. 58. R. MAYER, concl. sur CE, 28 mars 1964, Jaurou, DP 1924. III. 29, cité par P. AMSELEK, p. 654 ; v. aussi : É. BOUVIER et G. JÈZE, « La véritable notion de la loi annuelle de finances », Revue critique de législation et de jurisprudence, t. XXVI, 1897, p. 381-393, p. 427-451, p. 528-540, p. 564-574, spéc. p. 533. 59. CE, 31 oct. 1962, Lanson, Leb., p. 933, cité par P. AMSELEK, « Sur le particularisme de la légalité budgétaire, Rev. adm. 1970, p. 653-662, ici p. 656. 60. CE, 19 févr. 1965, Bellec, Leb., p. 120, cité par P. AMSELEK, ibid. 61. P. AMSELEK, « Sur le particularisme de la légalité budgétaire, op. cit., p. 654. 62. Ibid., p. 657. 63. GDCC, 14e éd., n° 35, p. 561. V. CC, décision n° 85-187 DC, 25 janv. 1985, État d’urgence en Nouvelle-Calédonie, JO du 26 janv. 1985, p. 1137. 64. Sur la qualification de règle générale, v. partie 1, titre I.

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