Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1 - (Page 151)

LA DISTINCTION DE LA GÉNÉRALITÉ PERSONNELLE ET DE LA GÉNÉRALITÉ MATÉRIELLE 133 394. À l’opposé, la jurisprudence révèle l’existence d’actes administratifs amatériels ou apersonnels non généraux. Les premiers correspondent aux actes-conditions du Doyen Duguit : ils sont individuels et ont pour fonction de désigner un ou plusieurs individus humains déterminés, comme une décision de nomination par exemple. Les seconds correspondent aux « décisions d’espèce », les actes pour lesquels le juge administratif rejette aussi bien la qualification d’acte réglementaire que celle d’acte individuel, comme l’acte de classement d’un site sur la liste des sites pittoresques : ils ont pour fonction de désigner un objet concret et unique et peuvent être dits tout simplement « concrets ». 395. En définitive, parmi les règles générales, il convient d’inclure les règles amatérielles qui créent de nouvelles personnes juridiques, qui instituent des catégories personnelles, et qui revêtent donc cette forme particulière d’abstraction qu’est l’impersonnalité, d’une part, et, d’autre part, les normes apersonnelles, qui créent de nouveaux objets de droit, déterminés en faisant abstraction des objets concrets auxquels ils correspondent dans la réalité naturelle, et dont on peut dire tout simplement qu’elles sont abstraites. 396. On trouve les règles apersonnelles ou amatérielles ailleurs que dans les seuls actes administratifs. Ainsi la règle selon laquelle « les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les régions, les collectivités à statut particulier et les collectivités d’outre-mer »210 est-elle une règle amatérielle générale, et plus précisément, impersonnelle. Celle signifiée par l’article L. 111-1 du Code du patrimoine, selon lequel « les biens appartenant aux collectivités publiques et aux collections des musées de France, les biens classés en application des dispositions relatives aux monuments historiques et aux archives, ainsi que les autres biens qui présentent un intérêt majeur pour le patrimoine national au point de vue de l’histoire, de l’art ou de l’archéologie sont considérés comme trésors nationaux », est au contraire une règle apersonnelle et générale. Il en est de même de celle signifiée par l’article L. 2111-1 du Code général de la propriété des personnes publiques, définissant le domaine public. *** 397. Il est donc possible, à ce stade de la recherche, de proposer une classification des règles juridiques en fonction de la généralité ou de l’absence de généralité de leur champ d’application211. Les règles juridiques se répartissent en deux grandes catégories : d’une part, les règles qui établissent une relation entre un sujet et un objet, et, d’autre part, les règles qui constituent soit un sujet, soit un objet. S’agissant des premières, il faut prendre en considération et la généralité personnelle et la généralité matérielle. Une règle peut être doublement générale, aussi bien personnellement que matériellement. On parlera alors de règle impersonnelle et abstraite. Ainsi en est-il des normes obligeant les citoyens français à payer des impôts, interdisant aux personnes publiques de vendre les biens relevant de leur domaine public ou aux mineurs, de porter des signes religieux dans l’enceinte des écoles, etc. 210. V. art. 72 de la Constitution. 211. V. tableau infra.

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