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126 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS de certains actes individuels qui constituent eux aussi des actes d’application, ou plus exactement, selon la terminologie duguiste, des actes-conditions183. 371. Pour Léon Duguit, l’ordonnancement juridique est composé d’une part, du droit objectif, c’est-à-dire de l’ensemble des règles de droit qui s’imposent aux individus sous une sanction sociale, et d’autre part, des situations juridiques objectives ou subjectives, qui découlent de l’application de ces règles184. Alors que les situations subjectives sont « des situations spéciales et momentanées, des situations qui ne peuvent être opposées qu’à une ou plusieurs personnes individuellement déterminées et qui disparaissent après qu’une certaine prestation a été accomplie185, les situations juridiques objectives « dérivent du droit objectif et (…) ont le même caractère de généralité et de permanence »186. Toutefois, certaines situations objectives, bien que dérivant du droit objectif, ne naissent que sous la condition que certains actes individuels aient été accomplis187. Cette conception de l’ordonnancement juridique conduit le Doyen de Bordeaux à distinguer trois types d’actes juridiques : les actes juridiques-règles, les actes juridiques objectifs ou actes-conditions, et les actes subjectifs, « suivant que l’intention du sujet est qu’il se produise une modification à une règle, à une situation objective ou à une situation subjective »188. L’acte objectif-condition est à la fois un acte objectif « puisqu’à sa suite naît une situation juridique objective », et un acte-condition « puisqu’il est la condition à laquelle est subordonnée l’application de la loi à une personne déterminée. La situation qui est faite à cette personne n’est pas déterminée par l’acte, mais par la loi et seulement par la loi, dont l’acte forme la condition d’application ». Léon Duguit donne, comme exemple d’actes objectifsconditions, le mariage, la légitimation ou la reconnaissance d’enfant naturel, la nomination d’un fonctionnaire. 372. Ainsi une décision de nomination d’un fonctionnaire, celle de naturalisation d’un étranger, actes administratifs individuels, sont considérées par Duguit et ses disciples de l’École de Bordeaux189, comme des actes-conditions, c’est-àdire des actes qui ne créent pas une situation juridique nouvelle mais se bornent 183. Sur ce sujet, V. S. THÉRON, La notion de condition - Contribution à l’étude de l’acte administratif, L’Harmattan, coll. « Logiques juridiques », 2002, p. 530 et s. 184. L. DUGUIT, Leçons de droit public général, Éd. La mémoire du droit, 2000, réimp. de l’édition de 1926, Paris, E. de Boccard. Si Duguit conçoit ainsi l’ordonnancement juridique, avec les règles générales d’une part, et les situations juridiques d’autre part, c’est pour évacuer la notion de droit subjectif, notion d’ordre métaphysique, qui ne peut donc être admise en science positive. Le droit subjectif est pour Duguit « un mythe, une fiction, une entité, produit de l’imagination métaphysique de l’homme, survivance des entités substantielles de la théologie scholastique » (Traité de droit constitutionnel, 3e éd., t. I, La règle de droit - Le problème de l’État, Éd. E. de Boccard, Paris, 1928, p. 434). 185. Ibid., p. 67. 186. Ibid., p. 65. 187. Ibid., p. 66. 188. Ibid., p. 76. et p. 78. 189. V. par ex. : G. JÈZE, Les principes généraux du droit administratif, t. 1, La technique juridique du droit public français, réédition de la 3e éd. (1925), préf. de S. Salon et J.-C. Savignac, Paris, Dalloz, 2005, coll. « Bibliothèque Dalloz », spéc. p. 44 et s : « Le décret par lequel le président de la République accorde la naturalisation (…), qui a « pour objet de placer l’individu naturalisé dans la situation juridique générale de national français ; (…) la décision du tribunal prononçant la faillite du commerçant ou l’interdiction judiciaire d’un fou ou donnant un conseil judiciaire à un prodigue ou prononçant le divorce, la séparation de corps, ou condamnant un individu aux travaux forcés, à l’emprisonnement, à la dégradation civique, à la relégation, etc. (…) Ces actes ont pour effet juridique d’investir un individu d’un status légal : le status de failli, d’interdit, de divorcé, de séparé de corps, de détenu, de relégué, de dégradé civiquement, etc. La nomination, l’élection d’un fonctionnaire, la

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