Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1 - (Page 122)

104 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS laquelle sont attachées des normes d’habilitation spécifiques repose autant sur des considérations temporelles que matérielles. Seule se pose une question de choix pour les disciplines juridiques »51. 2. L’utilité de distinguer l’objet du sujet des règles de droit 315. Reconnaître la double dimension de la généralité de la règle de droit s’avère utile afin de pouvoir classer toutes les normes en fonction de la généralité de leur champ d’application. Il est en effet nécessaire, si l’on veut proposer une classification intégrant tout le champ des possibles, c’est-à-dire permettant de classer toutes les normes juridiques, de prendre en compte non seulement la généralité personnelle mais aussi la généralité matérielle. 316. Certes, les conduites réglées par les normes sont des conduites nécessairement humaines. Mais il est impossible de tout rapporter à l’élément personnel. Soit la norme permettant à toutes les personnes résidant en France de voter : l’élément territorial se rapporte directement à l’élément personnel. Soit maintenant la norme selon laquelle le vendeur d’un fonds de commerce s’engage à ne jamais installer un fonds semblable dans un certain périmètre autour du fonds de commerce qu’il vend : l’élément territorial se rapporte cette fois-ci directement à l’objet de la norme et non à son sujet, le vendeur. Autre exemple : la norme qui interdit aux personnes traversant le territoire de la commune de stationner le long de telles ou telles voies publiques. L’élément « territoire de la commune » se rapporte directement à l’élément personnel, tandis que l’élément « telles voies publiques » se rapporte directement à l’élément matériel. Nier le domaine de validité matériel ne permet pas de rendre compte de ces nuances. 317. Bien plus, considérer l’élément matériel comme un simple élément de détermination de l’élément personnel est extrêmement réducteur. L’objet d’une norme n’est pas toujours une simple coordonnée du sujet. Michel Virally explique qu’une norme peut désigner ses destinataires de deux façons. Elle peut les désigner à partir d’éléments objectifs, « exclusivement par la situation dans laquelle ils sont placés » et, « dans ce cas, n’importe qui, n’importe quel individu humain est destinataire ou peut l’être dès le moment où il se trouve placé en fait dans la situation décrite »52. Elle peut également désigner ses destinataires à partir d’éléments subjectifs, c’est-à-dire « sur la base des qualités qu’ils présentent » telles que l’âge, le sexe, la nationalité, etc.53. Toutes les normes qui désignent ainsi, objectivement ou subjectivement, leurs destinataires, ont donc un sujet et un objet qui ne peuvent être confondus. Par exemple, la norme qui interdit aux personnes âgées de moins de dix-huit ans de circuler dans les rues après 20 h, a un sujet et un objet bien distincts : son objet, à savoir l’interdiction de circuler dans les rues après 20 h, ne se rapporte pas à tous les individus humains, mais seulement à ceux qui ont moins de 18 ans. De même, s’agissant de la norme selon laquelle les citoyens français ont le droit de vote, l’objet ne peut être considéré comme une simple coordonnée du sujet : la seule prise en considération de l’objet ne permet pas de déterminer le sujet. 51. G. TUSSEAU, Les normes d’habilitation, op. cit., ici p. 335. 52. M. VIRALLY, La pensée juridique, op. cit., p. 119. 53. Ibid., p. 120.

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