Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1 - (Page 112)

94 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS tifier qui sont les « citoyens français » ou les « propriétaires » visés par la norme, il faut se référer à des concepts juridiques, il en va de même pour déterminer ce qu’est le meurtre ou le contrat. 282. Pourtant, dans ses Cours de droit administratif, Charles Eisenmann admet que « toute norme est composée, en son fond, de deux éléments, objet, sujet (…) »10, ce qui le conduit à distinguer la compétence objective et la compétence subjective. 283. Dans les cours de 1956-1957, il explique : « Voici en somme la question qui se pose : les normes sont des propositions qui énoncent que des sujets doivent se conduire d’une certaine façon, c’est-à-dire accomplir certains actes ou ne pas accomplir certains actes. Si on les analyse, dans leur corps, on apercevra aussitôt deux éléments ou séries d’éléments : les uns qui déterminent les sujets visés par elles ; les autres, qui définissent la conduite qu’ils doivent tenir. Eh bien ! La question de la classification que j’ai évoquée est précisément de savoir si elle concerne l’élément “sujet” ou si elle concerne l’élément “conduite”, “acte” »11. 284. Du point de vue de l’élément subjectif, Charles Eisenmann propose de distinguer les normes qui portent sur la condition juridique de groupes de sujets, de catégories de personnes, et les normes qui portent sur la condition juridique de sujets individualisés, de personnes nommément désignées. Il propose trois terminologies – les normes anonymes et les normes nominatives, les normes collectives et les normes singulières ou individuelles, les normes personnelles et les normes impersonnelles – et choisit cette dernière. 285. Du point de vue de l’élément objectif, Charles Eisenmann distingue les règles de conduite permanente et les règles de comportement unique. Les premières sont des règles qui, tant qu’elles seront en vigueur, régiront la conduite de leurs sujets, soit chaque fois que les circonstances ou la situation qu’elles prévoient se présenteront ; soit de façon absolument continu, à chaque instant. Les secondes sont des règles qui prescrivent un acte unique parfaitement individualisé, à accomplir envers telle personne, en tel lieu déterminé, à tel moment déterminé. 286. Charles Eisenmann en conclut que la classification des normes générales et des normes individuelles ne suffit pas et qu’il est nécessaire de rétablir une double classification, l’une fondée sur les sujets, qui oppose les règles impersonnelles aux règles personnelles, et l’autre fondée sur la conduite réglée avec d’un côté, les normes qui ont pour objet une conduite concrète et de l’autre, les normes qui ont pour objet de régler la conduite de leurs sujets sans limitation de temps, pour une période illimitée. Ainsi, précise-t-il, « la loi normale est générale sous le double rapport que nous avons distingué, générale quant aux sujets, générale quant à l’objet »12. 287. Pourtant, si dans ses Cours de droit administratif, Charles Eisenmann distingue bien deux généralités correspondant aux deux éléments de la norme, sa conception de l’élément matériel est très réductrice. Il différencie en effet les sortes ou qualités de compétences (au nombre de deux) et les critères de compétence 10. C. EISENMANN, Cours de droit administratif, t. II, Paris, LGDJ, p. 248. 11. Ibid., p. 337 et s., spéc. p. 407. 12. Ibid., p. 413-415.

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