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84 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS différence y a-t-il entre la norme N1 selon laquelle telle personne doit verser une somme d’argent à une autre pendant 6 mois et la norme N2 selon laquelle telle personne doit verser une somme d’argent à une autre jusqu’à tel jour précis (6 mois plus tard) ? 250. Ne sont pas générales en raison de leur caractère non permanent, les règles qui visent un comportement humain ponctuel. 251. Il peut tout d’abord s’agir de règles qui prescrivent – ou permettent ou interdisent – une action ou abstention immédiatement. Par exemple, la norme N1, selon laquelle les habitants de tel immeuble doivent être expulsés immédiatement, n’est pas générale car dépourvue de permanence. Ne sont pas non plus générales les règles qui prescrivent la réalisation d’une action à une date unique mais indéterminée : la norme N2, selon laquelle quand tel individu X aura réalisé telle action (par exemple, dans un contrat, livrer une chose déterminée), tel autre individu Y devra lui payer telle somme d’argent. 252. Au contraire, les règles qui prescrivent – ou interdisent ou permettent – une action appelée à se répéter de façon périodique, un nombre indéterminé de fois, sont générales car permanentes. Ainsi, la norme N3, selon laquelle les habitants de tel immeuble doivent être évacués chaque fois qu’il y a un risque d’avalanche, est permanente donc générale. 253. Les normes N1 et N2 ne sont pas permanentes mais ponctuelles car elles doivent recevoir application une seule fois dans le temps. Toutefois, il convient à nouveau de souligner que leur absence de permanence ne signifie pas que leur existence même est éphémère. Ainsi, si le professeur Antoine Jeammaud refuse d’assimiler une décision à une règle parce qu’elle est « un acte tendant à modifier ponctuellement la situation ou l’objet qu’elle affecte et [qu’]elle s’épuise dans cette intervention », il reconnaît entre elles « une partielle analogie d’usage » dans la mesure où « ses effets, néanmoins, s’avèrent durables, car tant qu’elle n’a pas été mise à néant, il y a lieu de s’y référer pour déterminer la configuration ou la « valeur » juridique de la situation qu’elle a touchée : telle personne doit-elle ou non des dommages-intérêts à telle autre, tel acte privé ou public demeure-t-il valide ou a-t-il été annulé, quel est le titulaire de telle fonction ? Son usage est alors analogue à celui d’une règle. Celle-ci est en effet une espèce de modèle : c’est de sa vocation à servir de référence afin de déterminer comment les choses doivent être qu’un énoncé tire sa signification normative, et non d’un prétendu contenu prescriptif, prohibitif ou permissif d’une conduite »250. b) Le passé 254. Les normes rétroactives, c’est-à-dire les normes qui régissent des faits passés ou les situations de personnes constituées dans le passé, ne sont pas générales dans la mesure où elles visent des ensembles fermés de personnes et non des catégories. Ainsi, la loi qui amnistie les personnes ayant commis des contraventions commises avant le 20 juin 1969, donnée en exemple par Pierre Mayer dans sa thèse, ne concerne pas une catégorie car l’ensemble des individus concernés par la loi est clôturé par la date du 20 juin 1969. 250. A. JEAMMAUD, « La règle de droit comme modèle », DS 1990, chron. XXXIV, p. 199210, ici p. 200.

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