Finances publiques et fiscalité - Le système budgétaire de l'État au Maroc et en France - 185

LE RECOURS AU MARCHÉ

167

Dans ce sens, l’économiste américain KAUFMAN constate que si « à la fin des années 1980, le marché américain pourvoyait largement aux besoins finan‑ ciers des entreprises et des ménages, il est désormais saturé par l’État fédéral », et lui de préciser que « le Trésor qui présente la meilleure signature, a littéralement “usurpé” le marché ; celui des actions a été subordonné à un marché obligataire, lui‑même accaparé par le secteur public »25. À l’instar de nombreux pays, la France et le Maroc se sont engagés sur cette voie pour de nombreuses raisons, parmi lesquelles on peut citer l’amélioration des rendements des titres publics émis, et la limitation de l’effet d’éviction lequel ne permet pas aux entreprises privées de se financer aux conditions aussi favorables que celles reconnues auparavant au Trésor. Cette marchéisation s’illustre à travers deux principales dynamiques : l’affaiblissement du rôle des moyens traditionnels de financement du Trésor (1), et le renforcement du financement par le mécanisme d’émission des titres sur le marché (2). 1. L’affaiblissement du rôle des moyens de financements traditionnels 119. On entend par moyens de financement traditionnels, les différentes sources de financement mis à la disposition du Trésor, lesquels se caractérisent par l’absence des règles de la concurrence et par l’octroi des avantages exorbitants à ce dernier. Ce système de financement est marqué donc par une grande logique de facilité qui ne cesse de régner même dans le cadre de l’expérience française. a) Les traits communs des systèmes marocain et français 120. Les systèmes de financement du Trésor au Maroc et en France conti‑ nuent, malgré toutes les mesures visant à réduire la part des ressources hors marché, à recourir à d’autres ressources qui n’obéissent pas forcément aux règles de marché. Cependant, la part de ces ressources demeure très faible comparati‑ vement aux recettes générées par le recours au marché des adjudications. Deux principales catégories de moyens de financement doivent être rangées dans la liste de ces ressources : les ressources générées par le circuit du Trésor et celles des autres bons du Trésor émis en dehors du marché des adjudications. α) Le rôle des correspondants du Trésor 121. Comme il a été souligné précédemment, le financement du Trésor dans les deux systèmes budgétaires marocain et français repose sur le principe de l’unité de trésorerie qui consiste à brancher au circuit du Trésor un ensemble d’organismes publics. Cette unité permet au Trésor de se financer à des conditions avantageuses notamment en recourant à l’utilisation des fonds CCP et ceux des collectivités locales. À titre de rappel, le principe de l’unité de trésorerie est un principe juridique consacré au Maroc par le décret royal du 21 avril 1967 portant Règlement général de la comptabilité publique et en France par le décret de 1962 portant règlement de la comptabilité publique.
25. H. KAUFMAN, Interest rates, the markets and the new financial World, Times Book, 1986, cité par J.‑P. BOUERE et autres in Titres et emprunts obligataires, t. I, Banque éditeur, Paris, 1998, p. 33.

Finances publiques et fiscalité - Le système budgétaire de l'État au Maroc et en France

Table des matières de la publication Finances publiques et fiscalité - Le système budgétaire de l'État au Maroc et en France