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Doctrine dans lequel se trouve l'autre partie pour obtenir un engagement que celle-ci n'aurait pas souscrit si elle ne s'était pas trouvée dans cette situation de faiblesse ». À vrai dire, l'ordonnance ne fait ici que reprendre des formules jurisprudentielles qui sanctionnaient l'exploitation abusive d'un état de nécessité ou d'une dépendance économique 41. Or, sous l'empire de cette jurisprudence, on ne trouve pas d'exemple publié qui concerne une cession de droits sociaux. On peut penser que la formulation contenue dans le texte ne modifiera pas substantiellement la situation antérieure issue d'une opération de cession de droits sociaux. 37. Le régime de prescription de l'action en nullité ne présente pas d'originalité marquante par rapport au droit antérieur. Comme par le passé, le point de départ de l'action est le jour où la violence a cessé ; en cas d'erreur, le jour où elle a été découverte. Le délai pour agir était jusqu'à ce jour de cinq ans. Dans la rédaction actuelle du nouvel article 1143, il est indiqué que l'action en nullité ne peut être exercée audelà de 20  ans à compter du jour de la conclusion du contrat. Ce texte signifie que, à supposer l'apparition de phénomènes interruptifs de prescription par exemple, on ne pourra en aucun cas plaider au-delà de ce délai de 20 ans. En fait, il apparaît comme s'articulant avec l'article 2232 du Code civil selon lequel « le report du point de départ, la suspension ou l'interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit ». III. L'exécution du contrat 38. C'est sans doute dans la phase d'exécution du contrat que l'inspiration contradictoire dont procède l'ordonnance est la plus prégnante. En effet, le texte entend, d'un côté, faire respecter la parole donnée et cherche, d'un autre côté, à permettre au juge d'intervenir dans le contrat dans une perspective de justice commutative. Les parties à un contrat de cession de droits sociaux ou d'actions verront vraisemblablement quelque intérêt aux règles nouvelles concernant la mise en demeure (A) et plus encore à celles qui doivent permettre de sanctionner plus efficacement que ce n'était le cas jusqu'à présent l'inexécution des obligations contractuelles (B). Elles verront sans doute avec moins d'enthousiasme se multiplier les hypothèses d'intrusion du juge dans le contrat sous couvert de police contractuelle (C) et s'interrogeront sur l'incidence des règles nouvelles en matière de restitutions (D). 41 Cass. 1re civ., 3 avr. 2002, n° 00-12932, Bull. civ. I n° 108 : RJDA 8-9/02 n° 851 - Cass. com., 16 oct. 2007, n° 05-19 069, F-D : RJDA 3/08 n° 343. 254 A. La mise en demeure 39. Le projet d'ordonnance attache une importance particulière à la mise en demeure. Et ce, à un double titre  : d'abord parce que la mise en demeure conditionne la mise en œuvre des mécanismes permettant de sanctionner l'inexécution du contrat (v. infra, n° 43), ensuite parce que le mécanisme est bilatéralisé. 40. En effet, l'ordonnance envisage que la mise en demeure puisse être le fait du créancier (C. civ., art. 1322 et 1322-1), mais aussi qu'elle puisse être à l'initiative du débiteur. En particulier, l'article 1323 prévoit que « lorsque le créancier [ici, le vendeur créancier du prix] refuse, à l'échéance et sans motif légitime, de recevoir le paiement qui lui est dû ou l'empêche par son fait, le débiteur peut le mettre en demeure d'en accepter ou d'en permettre l'exécution  ». Cette disposition pourrait s'avérer intéressante pour le cessionnaire qui était assez démuni, lorsqu'il se heurtait à un refus ou à une résistance passive du vendeur, prélude à une inexécution de sa part. De fait, jusqu'alors, notre arsenal législatif n'envisageait guère la mise en demeure que comme un instrument entre les mains du créancier, vendeur, pour contraindre l'acheteur à s'exécuter ou pour constater son inexécution (C. civ., art.  1652). Dans la mesure où le droit spécial de la vente ne prévoit aucune disposition spécifique au bénéfice de l'acheteur, considéré comme débiteur du prix, on peut penser que l'article 1323 aurait vocation à jouer dans le contexte d'une cession de droits sociaux. Notons qu'il est précisé que cette mise en demeure du créancier «  n'interrompt pas la prescription  » (Projet, art. 1323, al. 3) ; elle arrête seulement, mais cela peut se révéler non dérisoire, le cours des intérêts. Que la mise en demeure n'interrompe pas la prescription ne doit pas étonner car tel est le choix fait par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile. Mais on peut se demander si le principe ainsi rappelé à l'article 1323 est d'ordre public dans la mesure où l'article 2254 du Code civil, issu de la réforme de 2008, autorise les parties à une convention à ajouter aux causes de suspension ou d'interruption de la prescription prévues par la loi et, par exemple, à ériger en cause d'interruption la simple mise en demeure. 41. Pour le reste, la réforme ne devrait pas, s'agissant de ce mécanisme de mise en demeure, entraîner des changements majeurs, ne serait-ce que parce qu'il existe en la matière des textes spécifiques à la vente (en particulier, l'article 1652 précité) qui vont donc évincer les règles de droit commun portées par le projet d'ordonnance. Par exemple, devrait être maintenue la règle selon laquelle, en cas de retard du cessionnaire à payer tout ou partie du prix convenu, le cédant a Bulletin Joly Sociétés * Mai 2015

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