ifremer n°98 - 1 février 2008 - (Page 2)

Les nouvelles de l Biodiesel suite de la page 1 P Comment votre laboratoire s’inscrit-il dans le projet Shamash ? Ce projet représente seulement une partie de l’ensemble du travail qui vise à utiliser les capacités qu’ont les micro-algues à stocker des lipides. De notre point de vue, faire de l’huile pour qu’elle soit brûlée ou être utilisée en alimentation, c’est un peu le même combat. Il s’agit de connaître les compétences qu’ont les microalgues à synthétiser ces huiles. Nous avons été contacté par Olivier Bernard, le coordinateur de Shamash, pour intégrer le projet sur les micro-algues et le biodiesel avec six autres partenaires. C’est très constructif, car tout le monde est très complémentaire. Il y a des modélisateurs, capables de prédire sans faire trop d’expériences les conditions optimales de croissance ; des spécialistes de l’extraction des huiles chez les végétaux ; des gens qui font déjà tourner des moteurs à l’huile de palme en Afrique ; des biologistes qui s’intéressent à des aspects fondamentaux comme la photosynthèse, phénomène au cœur de le vie des algues ; des collègues du génie des procédés, capables de penser des géométries de photobioréacteur pour que les algues se multiplient au mieux. Sur ce dossier, notre tâche est d’identifier et de sélectionner les meilleures algues possibles. Nous nous intéressons à d’autres domaines d’application, comme le remplacement des huiles de poissons dans l’aquaculture, un sujet qui va devenir important. Cela demande des compétences qui sont complémentaires. Et l’avenir est aux équipes pluridisciplinaires. Un laboratoire unique Le laboratoire de Physiologie et Biotechnologie des Algues de l’lfremer de Nantes, qui appartient au département Biotechnologie Marine, a développé un ensemble d’outils originaux qui lui permettent d’étudier et de produire quantité de micro-algues et d’imaginer de multiples applications. P P Les perspectives à moyen terme ? Concernant l’aspect énergie, nous saurons d’ici cinq ans si cela marche ou non. Car nous aurons de très bonnes réponses à tous les questions soulevées. D’ici dix ans, si les réponses sont positives, nous aurons du biodiesel à la pompe. Ce sont les prochaines échéances. Soixante sociétés à l’heure actuelle travaillent sur les micro-algues et le biodiesel. Il y a beaucoup d’argent investi. Shell, Boeing et d’autres prennent date pour le jour où cela pourra marcher. D’un point de vue général, la valorisation des micro-algues fera l’objet de programmes de biotechnologie ambitieux ainsi que le laisse présager le nombre de publications récentes sur ce sujet. Que ce soit en matière de santé, énergie, environnement ou alimentation, le laboratoire Algue d’Ifremer sera présent. Les nouvelles de l’Ifremer n°98 artenaire de Shamash, le laboratoire de Nantes emmené par Jean-Paul Cadoret, a pour vocation d’étudier, par les approches génomiques et écophysiologiques, le métabolisme des micro-algues en fonction de conditions environnementales auxquelles elles sont soumises. Ces études écophysiologiques visent à qualifier et quantifier la réponse des algues confrontées à divers facteurs prépondérants en cultures contrôlées : température, irradiance, pH, éléments nutritifs… L’approche génomique permet d’étudier la réponse du patrimoine génétique en fonction de ces mêmes facteurs. Le laboratoire dispose aujourd’hui d’une capacité exclusive et nationale à mettre en culture des micro-algues dans tout type de volume, pendant de longues périodes (6 mois) et de les « surveiller » par ordinateur. L’objectif est d’accéder à une meilleure compréhension de l’influence des divers facteurs du milieu, pour préciser les conditions de culture à mettre en oeuvre en vue de stabiliser la production de biomasse. Cette expertise lui permet de participer à de nombreux projets différents : Shamash par exemple, mais aussi la recherche d’un support à l’aquaculture par une qualification de l’alimentation « micro algue » (aide de la Région Pays de la Loire) ; l’application de molécules très originales dans le traitement de cancers (aide de la Région Pays de la Loire et de la Cancéropôle Ouest) ; voire enfin la production de molécules pharmaceutiques dans un programme ambitieux de biotechnologie : « les micro-algues comme usines cellulaires » (aide de la Région Bretagne). Au cœur de la recherche, et particulièrement sur le volet du biodiesel, © Ifremer / PBA Les permanents du laboratoire PBA (de gauche à droite) : Nathalie Schreiber, Isabelle Richard, Jean-Baptiste Berard, Marie-Lise Picquet, Jean-Paul Cadoret, Annie Hervé, Ewa Lukomska, Gael Bougaran, Raymond Kaas, Loic Le Dean et Catherine Rouxel. il s’agit de trouver la meilleure algue et d’imaginer le photobioréacteur qui permettra d’optimiser sa production. Car, paradoxe de « l’élevage » : l’algue naît de la photosynthèse mais, plus elle se multiplie et plus elle se fait de l’ombre ! Il faut donc imaginer des environnements avec des mouvements, des formes, des structures, des flux… originaux et optimum pour chaque espèce. L’ATOUT DE LA PLURIDISCIPLINARITÉ Les algues sont donc placées dans des photobioréacteurs dotés de multiples capteurs. Puis il s’agit d’observer leur physiologie, les phénomènes d’accumulation des lipides, ainsi que les gènes actifs au cours de la synthèse. Le développement d’outils de modélisation permet de simuler le métabolisme des algues et d’anticiper leur développement. Armoire thermostatée contenant des cultures de microalgues dans lesquelles différents paramètres sont contrôlés : luminosité, acidité, température, nutriments, concentration des microalgues. du 1er février 2008 Enfin il ne faut pas négliger le souci de créer plusieurs pistes afin d’espérer la plus grande rentabilité possible. Sur ce terrain, le laboratoire estime disposer d’une carte maîtresse avec sa pluridisciplinarité. Outre les acides gras, les micro-algues contiennent en effet des molécules très recherchées dans les domaines agro-alimentaire et pharmaceutique, comme les Oméga 3 et les antioxydants. Elles recèlent encore de la silice, des pigments et des sucres, valorisables dans l’industrie. Pour les exploiter au mieux, il faut améliorer les procédés de séparation de ces molécules. « Notre force est de disposer d’un ensemble d’outils de culture de micro algues dans tous les domaines, précise Jean-Paul Cadoret. Ce qui nous permet d’intégrer tous les champs d’application : alimentaire, santé, énergie et environnement ». Sur ce dernier volet, les micro-algues ont un grand potentiel. Imaginer des bassins de culture ou des photobioréacteurs installés à proximité de centrales thermiques classiques, de stations de traitement des eaux usées, d’élevages porcins ou aviaires. Il serait alors possible de dépolluer en trouvant tous les éléments nutritifs nécessaires au développement des micro-algues ! Et la biomasse créée est utilisable pour fabriquer du biocarburant ! Enfin, une fois les algues pressées et l’huile obtenue, il reste suffisamment de biomasse pour envisager d’autres débouchés, comme la fabrication d’éthanol, de biogaz ou d’électricité à base de méthanisation. « Cela j’y crois beaucoup. Même si à l’international, il existe de grosses équipes, israélienne, australienne, américaine ou encore allemandes, nos capacités de culture, d’analyse et d’étude, nous placent parmi les meilleurs. Les autres travaillent sur des sujets plus ciblés, sont plus fondamentaux. Nous, nous sommes un sas entre recherche fondamentale et industrie ». publiées dans © H. Raguet / Shamash 2007 / LookatSciences

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