Cultures marines n°286 - (Page 33)

bretagne sud Dossier Pénestin, secteur mytilicole menacé d'asphyxie Bertrand Tardiveau Comptant une trentaine d'entreprises pour environ 90 emplois ETP et un volume annuel d'environ 3 500 tonnes avec plus de 200 hectares concédés et 28 km de bouchots, le secteur mytilicole de Pénestin en baie de Vilaine reste celui qui s'est montré le plus dynamique ces dernières années en Bretagne Sud. Régulièrement impactés au printemps par des épisodes de Dinophysis, les professionnels ont, l'an dernier, été totalement épargnés par le phénomène mais aussi par les fortes mortalités qui ont durement touché leurs collègues vendéens et charentais. Coques et huîtres creuses Les producteurs ont été épargnés par les mortalités contrairement à leurs collègues vendéens et charentais. Défendue par la marque La Pénestin que porte le groupement de producteurs mytilicoles de Pénestin et sous laquelle un volume de 50 tonnes est certifié agriculture biologique, mais aussi depuis l'an dernier par l'appellation STG (spécialité traditionnelle garantie) moule de bouchot, la commercialisation de ce produit de qualité peine néanmoins à étendre ses frontières et à conforter ses prix (2,35 euros pour la prête-à-cuire), en raison de la forte concurrence exer- cée par la baie du mont Saint-Michel. En outre, les professionnels sont confrontés à un phénomène d'envasement important de l'estuaire de la Vilaine que la construction du barrage d'Arzal intervenue dans les années 1960 ans a été accusée d'accentuer. Avant que l'ouvrage subisse dans les prochaines années un important chantier de modernisation qui devrait limiter les rejets d'eaux douces, cette situation a d'abord inspiré la création d'un lotissement mytilicole de 8 hectares à Loscolo pour s'affranchir des eaux de l'estuaire. Après des années de lutte pied à pied, une entrée est espérée en 2018. La mise en exploitation d'une concession de 14 hectares de bouchots au large de Damgan est également en projet mais aussi en proie à de vives contestations (lire page 19). Si l'estuaire de la Vilaine continue d'intéresser les éleveurs de coques pour ses ressources en naissain, le secteur de Pénestin s'est imposé récemment comme un site de captage à fort potentiel pour l'huître creuse. Parallèlement, en dépit d'une production encore anecdotique, l'élevage de moules de corde tend à s'installer dans le Morbihan : on trouve des filières aux abords de l'île de Groix (Marc Caradec) mais aussi sur l'île Dumet (Edulis et Les Boucholeurs). Bernard Tobie : « Travailler à se faire conﬁance » Cultures marines. La patience semblerait être la meilleure arme pour faire avancer les dossiers de développement que vous portez. Comment faire face à l'hostilité qui est opposée ? BT. L'expérience nous a appris à agir avec méthode. Il y a un important travail d'explication à fournir. Il ne s'agit pas d'aller à la confrontation des points de vue. Dans le cas précis du projet du plateau des Mâts à Damgan, nous avons requis une expertise scientifique pour présenter un état initial, modéliser nos choix techniques et conforter nos ambitions. Il ne s'agit pas de vouloir convaincre à tout prix. C'est juste une opération pour rétablir la vérité. En même temps, il faut avoir le dos solide car pour l'obtention d'un accès au domaine public maritime, on peut compter au minimum 5 ans d'instruction et un budget de 100 000 euros pour les études. Pour obtenir le lotissement de Loscolo, c'est là encore un marathon mais que nous sommes sur le point de remporter. Nous attendons les procédures d'expropriation de deux parcelles avant de pouvoir démarrer l'emménagement. CM. Peut-on faire tomber les obstacles à l'essor de la conchyliculture ? BT. Nous devons clairement faire évoluer le schéma des structures en l'étendant notamment à la limite des 12 milles marins. Nous sommes tenus à une exigence de concertation avec les pouvoirs publics et les autres usagers. Par exemple, " " Il faut faire coexister plusieurs pratiques culturales. B. T. Mytiliculteur à Pénestin, dans l'estuaire de la Vilaine (Morbihan), Bernard Tobie est impliqué dans plusieurs projets forts qui doivent ancrer la conchyliculture sur le littoral sud breton. Cette expérience l'a conduit à prendre en charge les questions du schéma des structures et de l'environnement au sein du CRC. nous devons être transparents sur l'incidence de nos pratiques culturales sur l'environnement. Le seul renouvellement de nos concessions passe déjà par cette étape. Il faut ensuite élargir au maximum nos marges de manœuvre. À Pénestin, pour être plus spécifique, il doit y avoir une possibilité de faire coexister plusieurs pratiques " culturales. Les bouchots doivent faire de la place aux parcs de captage des huîtres creuses. C'est aussi une façon de réguler la biomasse, de faire en sorte que les espèces n'entrent pas en compétition les unes avec les autres. Cette logique doit aussi inciter les professionnels à travailler davantage entre eux et à se faire confiance. Cultures MARINES n°286 - mai 2015 33

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